Le congrès de Barcelone fédère en 1910 quatre-vingt-seize syndicats anarchistes en une Confédération nationale du Travail (CNT) dont la finalité est l'établissement d'une société anti-hiérarchique et anti-autoritaire, ce qui infère l'égalité des sexes. Plus concrètement, les statuts fondateurs affirment que la rédemption morale de la femme passe par son indépendance économique. Les participants, dans la continuation des précédents congrès anarchistes (congrès de Saragosse, 1872), rompent audacieusement avec le modèle de la Perfecta casada [la mariée parfaite].
De soubassements idéologiques catholiques, plus que de la perméabilité des Espagnols aux idées proudhoniennes, découlent l'idéal de l'« Ange au foyer » et le discours antiféministe des travailleurs. Il reproduit à l'identique les formules discriminatoires contre les femmes qui courent à travers toute l'Europe industrielle, mais il se structure autour d'une nature plus religieuse que biologique : la bonne épouse, bonne mère est le pilier de la sacro-sainte famille, gardienne des valeurs chrétiennes qu'elle transmet aux générations futures. Paysans et ouvriers, dans leur ensemble, adhèrent à ce modèle, et ce malgré leur anticléricalisme. Aussi dénoncent-ils le travail salarié des femmes comme contraire à la destinée des sexes et à la morale ; ces arguments voilent mal les craintes d'une concurrence jugée déloyale. La position anarchiste sur l'égalité des sexes est en décalage avec les mentalités.
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